La bouche de mon cheval, son dentiste et moi

Si vous suivez ce blog ou ma page Facebook, vous commencez à le savoir : pour les chevaux, le dentiste équin n’est pas optionnel. Il est important de veiller à ce que les dents et la bouche de votre cheval restent saines, exemptes de blessure et que les tables dentaires soient les plus symétriques possible.

Mais pourquoi toutes ces précautions sont-elles si indispensables pour le cheval ? Alors même que certains humains ne vont jamais chez le dentiste et s’en portent bien ?

Et bien parce que nous n’avons pas du tout les mêmes dents !

Dans cet article, nous allons faire un tour du propriétaire de la bouche de votre cheval. Qu’est-ce qui rend les dents du cheval si spéciales ? Qu’est-ce qu’une surdent ? Que puis-je faire pour m’assurer que tout va bien en dehors du passage du dentiste équin ?

C’est parti !

La bouche de mon cheval

Les dents

Composée de 36 à 40 dents (ces 4 dents en plus peuvent être les crochets chez les mâles ou les juments dites “bréhaignes”, explications plus loin), la denture se répartit en arches, en haut sur la mandibule et en bas sur la maxillaire.

On les appelle donc “arche maxillaire” et “arche mandibulaire”.

On trouve dans la bouche du cheval 12 incisives (6 en haut, 6 en bas) qui permettent au cheval, après avoir effectué un pré-tri à l’aide de ses lèvres, de couper l’herbe rase. Ce groupe de 12 incisives est lui même composé de 4 pinces (les 4 dents les plus au milieu), de 4 mitoyennes (autour des pinces) et de 4 coins (les dernières incisives avant les barres). 

Juste derrière les incisives, il y a un espace sans dents que vous connaissez bien, puisque ce sont les barres. Les mâles présentent 4 crochets (ou canines) à ce niveau là, 2 en haut et 2 en bas. Les juments n’ont normalement pas de crochets sauf certaines, les juments bréhaignes, qui peuvent avoir 1 à 4 crochets. 

Viennent ensuite les prémolaires, au nombre de 12 puis les molaires au nombre de 12 également. Ces 24 dernières permettent au cheval d’écraser et de broyer la nourriture.

Crédits : Planche anatomique par Susan E.Hakola et Jeffrey B.Diring @Cruz Bay Publishing

Cet ensemble constitue la table dentaire. L’arche maxillaire est légèrement plus large que l’arche mandibulaire : c’est c’est “crête” que vous pouvez sentir le long de la tête sur les joues. Les dents sont également légèrement inclinées. Les dents du cheval poussent toute sa vie (sauf les canines !) et sont particulièrement sensibles.

Dedans la dent

La structure de la dent du cheval n’est pas non plus identique à la nôtre. Et ceci explique sa sensibilité si particulière. En effet, l’émail n’y occupe pas la même place de choix et la composition change également au cours de la vie de l’animal [1].

Crédits : Planche anatomique par Susan E.Hakola et Jeffrey B.Diring @Cruz Bay Publishing

Sur cette image vous pouvez voir la coupe d’une incisive, de l’intérieur de la gencive jusqu’au bout de la dent :

  1. Cément périphérique
  2. Email périphérique
  3. Cément central
  4. Email central
  5. Infundibulum [2]
  6. Dentine
  7. Étoile dentaire (dentine secondaire déposée dans la cavité pulpaire)
  8. Vestiges d’un infundibulum
  9. Cavité de la pulpe contenant vaisseaux sanguins et nerfs
  10. Os

L’explication à la sensibilité dentaire expliquée plus haut se trouve dans le petit 1 du schéma : le cément périphérique.

Contrairement à l’émail, qui est majoritairement composé de matières inorganiques, le cément est lui composé pour près de la moitié de matières organiques et revêt donc une certaine sensibilité. Chez le cheval, l’émail est en couche fine autour des structures internes. Les prémolaires et les molaires ont, elles, ce que l’on appelle la “dentelle” qui est une excroissance d’émail permettant au cheval de broyer la nourriture sans se faire mal (heureusement !). On dit qu’elles ont une surface occlusale.

Il faut donc garder à l’esprit que les dents du cheval sont sensibles, bien plus sensibles que les nôtres. Et qu’une fois les dents définitives sorties, il faut veiller à ce que les tables dentaires restent efficaces et les dents à niveau.

Les dents de lait et les dents de grand

Tout comme chez l’humain, le cheval a des dents de lait, qui tombent pour laisser la place aux dents définitives.

Une fois toutes les dents sorties et la croissance terminée, la bouche du cheval, dans sa forme, ne “bouge” plus trop (en dehors de pathologies particulières). La forme de la cavité buccale re-commence à changer vers 17 ans, avec la pointe des incisives vers l’extérieur. Observer les dents d’un cheval est un moyen de connaître avec une assez bonne précision son âge. Les dents de lait sont appelées “décidues” (deciduous) et les dents définitives sont appelées “permanentes” (permanent). En effet, la forme même des dents est un indicateur de l’âge. Tout comme certaines marques typiques et tout comme les moments d’éruption :

Ces indicateurs étant fiables, certains gros c…malins, “sculptent” les dents des jeunes chevaux afin de mentir sur leur âge ! Ce genre de manipulations sont évidemment douloureuses pour les chevaux mais peuvent aussi entraîner de très gros problèmes. Et une immense souffrance si les structures internes des dents se retrouvent à nu… Ces pratiques sont heureusement rares et de plus en plus rares mais il faut – malheureusement – savoir que cela existe.

Crédits : Planche anatomique par Susan E.Hakola et Jeffrey B.Diring @Cruz Bay Publishing

Hypsodontie vs. brachyodontie

Bon ok, le cheval a des dents de lait puis elles tombent et laissent place aux dents permanente et la cavité buccale ne bouge ensuite plus trop. Alors, pourquoi on appelle le dentiste tous les ans ou plus ? 

Parce que l’hypsodontie les amis (comment ça c’est pas une réponse ?!)

L’hypsodontie c’est l’une des principale différences entre les dents des humains et des équidés. Et aussi la raison pour laquelle votre cheval voit plus souvent le dentiste que vous.

La différence réside dans le développement des racines. Chez l’homme, les racines sont complètement développées dès le départ, tandis que chez les chevaux, elles poussent et se développent pendant plusieurs années. Par contre, la couronne ou l’émail de la dent est complètement développé chez le jeune cheval. Une partie de la couronne est incrustée dans l’os alvéolaire (dans la mâchoire) et appelée couronne de réserve. Il convient de garder à l’esprit que l’émail ne sera plus généré après l’éruption de la dent permanente.

Les dents vont s’user en mâchant, surfaces occlusales contre surfaces occlusales. Mais, en même temps, elles continuent de sortir de la mâchoire (éruption). L’usure seule due à la mastication n’est pas toujours suffisante. D’une part parce que l’alimentation du cheval ne lui permet pas toujours “d’user” convenablement ses dents ; mais aussi parce que les arches maxillaires et mandibulaires ne font pas tout à fait la même taille.

Cinématique des tables dentaires

L’usure naturelle des dents se fait au fur et à mesure de la mastication. Le mouvement masticatoire décrit un 8 avec des mouvements sur le côté (latéralo-latéralement) et d’avant en arrière (rostro-caudalement). Il y a évidemment des variations dans la façon de mâcher de chaque cheval mais on retrouve toujours ces mouvements. Ci dessous, la classification des mouvements masticatoires du cheval de Ahlgreen :

Un cheval en bonne santé, dont la cavité buccale est saine est un cheval qui n’est pas contraint dans ces mouvements masticatoires. Comme vous le savez certainement, des restrictions de mouvements au niveau des tables peuvent entraîner des restrictions et des dommages très loin dans le corps du cheval.

“C’est à dire qu’un problème dentaire aura des conséquences directes sur les structures tissulaires et articulaires du corps, notamment les os de la tête et les cervicales. Inversement, des blocages articulaires peuvent créer des problèmes dentaires (mauvais alignement dentaire, surdents). 

Il faut noter que tout verrouillage articulaire peut être la cause d’un déséquilibre dans la bouche du cheval. Un blocage de la hanche, du bassin ou du dos crée des tensions pathologiques dans tout le corps qui peuvent se compenser au niveau des ATM. Le cheval a donc une mastication asymétrique ce qui entraîne une usure irrégulière des dents avec apparition de rampes et de surdents. Les aliments sont alors mal broyés et moins bien digérés dans le tube digestif.”

France LE PERU Ostéopathe animalier, pour un article de Le Paturon.

Il est donc d’une importance capitale que votre cheval soit correctement suivi.

Et pour ça, il y a le dentiste équin.

Son dentiste

Deux professionnels

En France, pour le soin des dents de votre cheval, vous pouvez faire intervenir deux corps de métier : le Vétérinaire ou le Technicien Dentaire Equin (TDE). Chaque praticien TDE est un spécialiste des dents et de la bouche du cheval. Il peut travailler en manuel (râpes mécaniques) ou électrique (râpes entraînées) ou une combinaison des deux. Il peut également être amené à sédater le cheval ou pratiquer des anesthésies locales en fonction des opérations et du besoin. Ces dernières pratiques sont très encadrées en France et ne peuvent se faire que par un vétérinaire, qui assistera le TDE en cas de besoin.

Crédits : Vetostore

Le système de notation

Les dentistes équin utilisent des notations codifiées dans leurs rapports. Le plus répandu est le système Triadan. Il s’agit d’un système de notation appelé « Modified Triadan System ». Il attribue à chaque dent un nombre composé de 3 chiffres :

  • le premier indique dans quel cadran la dent de trouve. Les tables sont découpées en 4 parties : haut-droit=1, haut-gauche=2, bas-gauche=3, bas-droit=4.
  • le second et le troisième indiquent la position de la dent de l’avant du crâne à l’arrière. (rostral à caudal, de 01 à 011)

Le premier chiffre renseigne également sur le fait que la dent soit définitive ou décidue (= de lait). Dans le cas d’une dent primaire, le premier chiffre sera compris entre 5 et 8 ; toujours selon son cadran.
Ça n’est pas le seul système de notation qui existe mais c’est le plus répandu en dentisterie équine. Il peut être utile de le connaître.

A quelle fréquence ?

Le dentiste équin intervient pour l’entretien des dents autant que pour des pathologies complexes qui leur sont liées. Cela peut être une simple mise à niveau des tables dentaires ou un détartrage ou des opérations plus complexes et des extractions. Il intervient généralement une fois par an ou plus en cas de besoin mais dans tous les cas, au moindre doute, il ne faut pas hésiter à l’appeler : plus un éventuel problème est pris tôt, mieux c’est. L’intervention simple coûte entre 40€ et 110€ en fonction des techniciens et des régions. En Haute-Garonne, la moyenne des prix est d’environ 50€ (ce qui n’est pas grand chose niveau investissement-utilité, on est d’accord).

Tous les vétérinaires peuvent faire de la dentisterie si ils sont équipés. Les TDE ont suivi une formation de plusieurs années et sont réunis autour d’une fédération.

Les pathologies courantes

Les surdents et le tartre

Ce sont les deux raisons les plus courantes de l’intervention du dentiste équin. Les surdents sont des crêtes provoquées par la pousse inégale des dents. Elles sont très tranchantes. Les surdents peuvent se développer sur les côtés des molaires et prémolaires, généralement vers l’extérieur sur les maxillaires et vers l’intérieur pour les mandibulaires. Mais elles peuvent aussi se développer à l’avant d’une dent (prémolaires) ou à l’arrière (dernières molaires) : on parle alors de rampes ou de dominances. Ces dernières apparaissent lorsqu’il y a un décalage, léger ou plus important, entre tables maxillaires et mandibulaires et peuvent entraîner une très grande restriction de mobilité, pouvant empêcher, si non traitée, le cheval de se nourrir correctement. Les surdents latérales quant à elles peuvent blesser la langue et l’intérieur des joues.

Il est donc indispensable de s’assurer que les surdents ne soient pas présentes, notamment car la  muserolle passe au niveau des prémolaires. Il est d’autant plus indispensable de faire un suivi plus régulier encore dans le cas où vous montez votre cheval en side-pull !

Le dentiste équin va éliminer ou diminuer ses aspérités, y compris en fond de bouche. Pour ce faire, il utilise des râpes de différentes formes et longueurs, ainsi qu’un pas d’âne, permettant d’ouvrir en grand la bouche de votre cheval et d’accéder au fond de bouche (important et indispensable). La seule présence du pas d’âne exerce une petite contrainte mécanique sur les ATM (articulations temporo-mandibulaires), c’est pour cela qu’il est toujours utile de faire passer un thérapeuthe manuel consécutivement à la venue du dentiste.

Sur cette image il y a à la fois des surdents latérales et une rampe sur la première prémolaire car ce cheval était légèrement bégu. La dent antagoniste ne pouvant donc pas assurer son rôle de “râpe naturelle”, la rampe s’est formée dans le « vide » qu’elle a laissé. Il faut savoir qu’en raison notamment de la longue sélection génétique chez les chevaux, beaucoup de chevaux sont aujourd’hui begus.
Crédits image : Haras Nationaux.

Quant au tartre, il peut se développer très vite en quantité importante chez certains chevaux. Si sa présence ne fait pas de “mal” en soit, il est important d’enlever le tartre très régulièrement. Présent en quantité importante et prolongée, il peut déclencher une inflammation gingivale et peut aller jusqu’à l’abcès. Le dentiste l’enlèvera durant son intervention mais vous pouvez également vous y coller (hé oui !) après que le dentiste vous ait montré comment vous y prendre et si vos gestes sont assurés.


Les dents de loup

La dent de loup (ou dent de cochon, si présente sur la mandibule) est une toute petite dent atrophiée qui pousse en avant des première prémolaires. Ce genre de dents ne poussent pas chez tous les chevaux. Elles ne sont généralement pas gênantes mais peuvent l’être chez certains chevaux chez qui elles peuvent être très avancées sur les barres ou chez des chevaux qui ont peu de longueur et peu de place en hauteur pour le mors. Evidemment, le contact de l’embouchure avec les dents de loup est très douloureux pour le cheval, comme le contact avec n’importe quelle autre dent, par ailleurs. Le dentiste équin peut également être amené à enlever ces dents. C’est une opération très rapide.

Diastème, dent cassée, dents de lait, dents sur ou sous numéraires, périostite, tables en vague…

Il y a tout un tas d’autres pathologies qui nécessitent intervention et surveillance du dentiste équin. Vous pouvez retrouver plus d’informations iciiciici ou  (non exhaustif, bien sûr !).

Note : Bien qu’un dentiste équin ne puisse pas vous dire quelle embouchure conviendra à votre cheval avec certitude, il peut déjà voir si une embouchure (ou une ennasure, d’ailleurs) actuelle a causé ou peut causer d’éventuelles blessures à votre cheval et si votre cheval a des particularités occlusales ou morphologiques à prendre en compte. Le dentiste équin n’est certes pas ergonome mais il peut formuler de précieux conseils sur la bouche de votre cheval et ses éventuelles particularités.

Ce “compte-rendu” de votre dentiste est toujours intéressant pour nous, ergonomes, car bien que nous puissions supposer certaines particularités, nous n’avons pas de pas d’âne avec nous lors des consultations (d’ailleurs ça serait assez contre-productif étant donné les efforts que nous allons demander à votre cheval par la suite) pour voir la totalité des tables et le fond buccal. 

Gardez donc bien en tête tout ce qui vous aura été dit, ces informations sont aussi importantes que celles de votre vétérinaire ou de votre ostéo !

On vous propose un « bit-seat » ? Fuyez !

On me demande (trop) souvent ce que je pense du “bit seat » en tant que ergonome. Je profite de ce billet pour répondre : j’en pense pas du bien.

Le “bit seat” est une pratique aussi ancienne qu’elle est débile (oui, pas d’autre mots), qui consiste à profiler de façon importante les prémolaires sur leur face mésiale (= à l’avant) pour permettre un contact moins brutal du mors sur les crêtes des prémolaires. En gros, c’est faire une place au mors en enlevant de la dent. On va sourire pour pas pleurer.

D’une part, modifier les surfaces occlusales et prendre le risque d’exposer la dent est curieux de prime abord. Là où ça devient carrément débile c’est de prendre ce risque insensé alors que le mors ne doit JAMAIS toucher les dents, d’aucune manière, à aucun moment, aucune dent, quel que soit les particularités du cheval ! (c’est quelque chose que l’on verra prochainement dans un billet consacré aux réglages de base).

Le dentiste fait en sorte d’éliminer ou d’atténuer les aspérités et éventuellement “adoucir” afin qu’aucune blessure et aucun inconfort ne vienne interférer. C’est tout. Si on vous propose de limer la moitié de la dent pour le mors (?!), y’a problème.

Et vous !

Oui, l’article s’appelle “La bouche de mon cheval, son dentiste et moi” et on arrive donc au “et moi” (ça veut dire que c’est bientôt fini hé !).

Que pouvez-vous faire et comment pouvez-vous veiller à la bonne santé bucco-dentaire de votre cheval ?

De l’extérieur : observez votre cheval

Il y a une foule d’indicateurs qui peuvent faire soupçonner un problème bucco-dentaire. Votre cheval peut mettre plus de temps à manger/mâcher différemment, il refuse le mors ou est moins enclin à le prendre en bouche, les allures sont étriquées, il maigrit de façon inexplicable, il semble stressé/tendu, il se défend lors du travail monté (de s’encapuchonner à s’ouvrir et vous arracher les rênes), il penche la tête sur le côté…

Vous remarquerez que certains de ces problèmes peuvent aussi être révélateurs d’un cheval qui est mal dans son dos et/ou mal sous sa selle. Ils peuvent en être la cause mais aussi la conséquence !

Si vous ne savez pas par où commencer, par où “prendre le problème”, je vous conseille dans tous les cas de faire appel au dentiste en premier lieu. Ensuite, à l’ostéopathe. Après, à l’ergonome-selle. Puis, à l’ergonome-briderie/embouchures.

Dans cet ordre vous vous donnez toutes les chances de résoudre ce type de problèmes !

De l’intérieur : observez sa bouche

Bien que vous n’aillez pas de pas d’âne non plus, quelques vérifications et gestes simples peuvent vous aider à prendre soin de votre cheval. En écartant délicatement les lèvres, vous avez une vue de côté des incisives et des crochets s’ils sont présents mais aussi d’une (petite) partie de la langue et des gencives. Rien qu’avec cette vue, vous pouvez déjà porter votre attention sur la mal de choses :

  • L’aspect des muqueuses, des gencives, de la langue : sont elles roses/rouges/blanches ? Sont-elles gonflées ? Y a t-il des marques, des aspérités, des blessures ?
  • Les incisives : sont-elles au même niveau ? Y a t-il la présence de queue de pie (= rampe à l’arrière des prémolaires) ? Y a t-il de la nourriture accumulée entre les dents ou un écartement inhabituel (= diastème) ? Les incisives et les crochets ont-ils du tartre ?

Les rampes sur les prémolaires peuvent être révélatrices d’éventuelles surdents plus loin en fond de bouche, que seul le dentiste pourra observer.

Vous pouvez ensuite – avec force douceur et précautions – aller un peu plus loin dans votre exploration. Note : lavez-vous toujours les mains avant de les mettre dans la bouche de votre cheval (ou portez des des gants) et lavez les encore si vous devez observer la bouche d’un autre cheval :

  • Toucher les barres : sont-elles lisses/fines/rondes/épaisses/abîmées ? Les muqueuses dessus sont elles exemptes de blessures ? Les barres ont-elles des aspérités ?
  • Regarder le palais : a t-il la même couleur que les muqueuses ?
  • Regarder/Toucher l’intérieur des joues : le bol alimentaire est-il présent ? Le cheval fait-il des “boulettes” de nourriture ? Plaque t-il la nourriture entre ses joues et ses dents ?

En écartant délicatement les lèvres on peut déjà voir un certain nombre de choses. Ici, du tartre sur le crochet et le coin inférieurs, de la nourriture coincée entre les incisives supérieures et un léger décalage entre les deux coins ; par exemple.

Vous pouvez ensuite “boucher” votre cheval, c’est à dire saisir sa langue et la sortir délicatement sur le côté pour observer cette dernière ainsi que le palais à la recherche de marques ou de blessures. Vous pourrez également, précautionneusement, aller toucher le côté des prémolaires, côté joue (très utile si vous montez en side-pull, vous pouvez déchirer une joue à cause d’une surdent !). Nota : je ne vous conseille pas de le faire sans qu’il ne vous ait été montré préalablement par un professionnel. La langue est très délicate et provoquer une tension à la base de celle-ci peut avoir des conséquences catastrophiques.

En outre, la mauvaise haleine est assez révélatrice elle aussi d’un soucis : les herbivores n’ont généralement pas mauvaise haleine. Sauf quand ils couvent un truc !

Pour finir

L’observation et la palpation de votre cheval ne prend que quelques minutes et peut vous apporter des informations précieuses. Je vous recommande de faire ces vérifications le plus souvent possible (sans que ce ne soit excessif, notamment la palpation qui ne doit pas être trop fréquente), pourquoi pas en écartant simplement les lèvres avant de mettre l’embouchure pour partir travailler ?

Dernière précision avant de clore cet article : pensez à laver les embouchures après chaque sessions de travail !

Trop souvent je vois des embouchures pleines de salive et/ou d’herbe séchée regagner sans plus de cérémonie la bouche du cheval. Outre l’aspect peu ragoûtant pour le cheval de l’objet plein de muscus, le manque de nettoyage peut poser plusieurs problèmes :

  • Le microbiote buccal du cheval est un écosystème complexe. La salive présente sur le mors et laissée séchée à l’air libre constitue un nid douillet pour les bactéries et germes de passage qui se retrouveront dans la bouche de votre cheval, pouvant déséquilibrer ce microbiote ou provoquer des infections.
  • Le cheval n’aura probablement pas envie de se laisser mettre le mors dans la bouche dans cet état. Le refus peut devenir catégorique.
  • La ou les articulation(s) du mors peuvent s’en trouver contraintes, les anneaux coulissent moins bien, les charnières sont moins souples.
  • Les matériaux peuvent s’abîmer, notamment certains alliages sensibles à l’humidité, les caoutchoucs et les polymères

Un coup sous le jet d’eau ou dans un seau dont l’eau est changée à chaque usage et un séchage correct avec un chiffon dédié à cet usage limite déjà grandement ces risques.

Là, c’est fini 😉

[1] : Englisch LM, Kostrzewa K, Kopke S, Failing K, Staszyk C (2017) Uneven distribution of enamel, dentine and cementum in cheek teeth of domestic horses (Equus caballus): A micro computed tomography study. PLoS ONE 12(8): e0183220. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0183220

[2] : En anatomie, un infundibulum est une partie en forme d’entonnoir, creuse ou creusée.

Laetitia Ruzzene

Laetitia Ruzzene

Cet article a été écrit par Laetitia Ruzzene et appartient au titre des droits d’auteurs au site https://www.bit-fitting.fr. Les textes contenus dans cet article peuvent être réutilisés ou distribués dans la mesure de la mention de son auteur ainsi que de l’origine de l’article (lien URL direct).

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